Noël en Provence est un moment riche en traditions. Les santons et la crèche provençale sont réputés dans le monde entier. Mais savez vous que le réveillon de Noël, le 24 décembre au soir, s’appelle le Gros Souper? Et les treize desserts emblématiques de notre région, en connaissez vous la composition et la symbolique?
En Provence, traditions anciennes et symboles religieux se mêlent pour fêter cet évènement très attendu. Aujourd’hui, les treize desserts ont largement dépassé les frontières du pays de Frédéric Mistral. Le « Gros Souper », repas très codifié du réveillon de Noël d’antan, mérite d’être connu et pourquoi pas adopté pour sa simplicité et ses mets authentiques.
Traditionnellement, pour fêter Noël en Provence, ce repas du réveillon qui réunissait toute la famille, le 24 décembre, se prenait avant la Messe de Minuit et se devait d’être maigre. Il participait au recueillement dans un esprit de partage et de simplicité. Son rite le plus emblématique : le Cacho Fio, s’ancre dans la tradition païenne du passage au solstice d’hiver. La bûche que nous dégustons à Noël est probablement l’héritière du Cacho Fio provençal.
Les roulettes vous disent tout sur cette belle tradition qui est encore largement suivie par les provençaux, avec quelques adaptations dues aux temps modernes. Et puis, ce repas aura l’avantage de ne pas encombrer votre foie !
Noël en Provence : le Gros Souper, une tradition encore bien vivante
Frédéric Mistral au 19ème siècle décrit dans ses « mémoires et récits » le Gros Souper ou « Gros Soupa ». Cette tradition du souper du 24 au soir est un ensemble de rituels, de symboles, de gestes, et de pensées à respecter avant la messe de minuit et le passage du Père Noël.
Avec la crèche et les santons, le Gros Souper ou du moins certains de ses plats, fait toujours partie de la tradition provençale de Noël.
Sommaire
L’organisation du Gros souper ou « Gros Soupa », rites et symboles du réveillon de Noël
Une table à l’esprit de Noël : paix, fraternité, recueillement
Pour la table du réveillon de Noël, trois nappes blanches sont superposées: une pour le gros souper, une pour le repas de midi du lendemain « le repas de Noël » et la dernière pour le soir du 25.
Elles rappellent la Sainte Trinité des Chrétiens : le Père, le Fils et le Saint Esprit.
Sur la table et pour l’éclairer, vous disposerez un chandelier avec trois bougies qui symbolisent le Passé (le souvenir de nos proches décédés), le Présent (la fidélité aux amis et parents et le Futur (les enfants à naitre).
Vous déposerez aussi une branche de houx : pour sa symbolique chrétienne. Le houx a des feuilles vertes persistantes, symbole d’éternité et de promesse du printemps prochain. Elle sont aussi dentées et épineuses symbole de la couronne du Christ pendant sa passion. Ses baies sont rouges vif comme son sang versé.
Il vous faudra aussi un pain coupé en trois : la part du pauvre, la part des invités et une part qui sera conservée dans une armoire.
Le 4 décembre jour de la Sainte Barbe, vous n’aurez pas manqué de composer trois assiettes avec du blé qui le 24 décembre aura levé en un joli pâturage. Ce blé symbolise à nouveau la Sainte Trinité et l’Espérance.
Votre plus beau service agrémentera votre table du réveillon de Noël, sans oublier de mettre le couvert (la place) du « pauvre » pour un mendiant de passage ou d’une personne décédée.
Le Réveillon de Noël en Provence: le Cacho Fio ou l’allumage du feu
Noël en Provence, c’est bien sûr l’occasion de réunir ceux que l’on aime.
A 19 heures la famille se réunit pour Cacho Fio. Mélange de rites religieux et de rites païens, cet allumage du feu se fait en pensant au premier soleil de l’année du Nouvel An.
Le Cacho Fio est, à l’origine, un rite païen, en relation avec le solstice d’hiver. La tradition veut que le « caganis« , le petit dernier, doit choisir la plus grosse bûche d’un arbre fruitier. Celle ci doit se consumer pendant trois jours et trois nuits.
La famille fait alors trois fois le tour de la table et l’on procède aux libations: le plus jeune arrose la bûche à l’aide d’un rameau trempé dans un verre de vin cuit, et l’aïeul prononce les paroles de bénédiction, en provençal, et tous les deux mettent la bûche dans le feu.
Voici les paroles de bénédiction (en français) prononcées pendant le Cacho Fio:
Bûche de Noël,
Donne le feu
Réjouissons-nous
Dieu nous donne la joie
Noël vient, tout vient bien
Dieu nous fasse la grâce de voir l’an qui vient
Et si nous ne se sommes pas plus
Que nous ne soyons pas moins
Chez Frédéric Mistral on trouve l’incantation suivante :
Allégresse ! Allégresse, mes beaux enfants, que Dieu nous comble d’allégresse !
Avec Noël, tout bien vient :
Dieu nous fasse la grâce de voir l’année prochaine
Et, sinon plus nombreux, puissions-nous n’y pas être moins.
De nos jours, les cheminées se faisant rares, la bûche dessert a remplacé la bûche de bois ! C’est une façon gourmande de faire évoluer la tradition.
Noël en Provence, le menu du Gros Souper
Tous les plats doivent être disposés sur la table. Après le repas, on ne dessert pas la table. Il est de coutume de relever les coins de la nappe pour permettre aux âmes des défunts et aux anges de venir manger.
Ce Gros Souper est en fait un repas composé de 7 plats en souvenir des 7 douleurs de la Vierge Marie. Le repas est maigre parce que les plats présentés sont simples mais gros ou copieux par le nombre des plats.
Au menu du réveillon de Noël : 7 plats maigres pour le Gros Souper
L’aigo boulido ou soupe d’ail, des poissons comme l’alose ou la morue, des légumes comme les cardes et des épinards en gratin ou crus accompagnés d’une anchoïade, des escargots. Chez les personnes qui assistent à la messe de minuit, le repas se termine sans dessert. Les douceurs sont dégustées après la messe.
Noël en Provence jamais sans les 13 desserts
Après la messe de minuit, les convives dégustent les 13 desserts. Le chiffre 13 représente le Christ et les 12 Apôtres.
En Provence, on se chamaille souvent quant à la composition de ces treize desserts et pour mettre tout le monde d’accord, on peut dire que la tradition qui remonte au 17ème siècle a évolué. « Ce n’est pas grave qu’il y en ait plus, mais il ne doit pas y en avoir moins ! »
Je ne vous fait pas « languir » plus longtemps : voici la liste des 13 desserts telle que codifiée par le Musée des Arts et Traditions populaires du terroir marseillais à Château Gombert.
Vous devrez donc vous procurer des pommes, poires, verdaù (melon vert conservé dans le grain), raisins frais, sorbes, nougat blanc, nougat noir, noix, amandes, noisettes, figues sèches, pompe à l’huile, raisins secs.
A cela on peut ajouter des dattes et des oranges
Consulter notre article détaillé sur la liste des 13 desserts
13 desserts et la bonne fortune de notre côté pour un an
Après le Gros Souper, chaque convive se doit de manger un peu de tout pour mettre la bonne fortune de son côté pour la nouvelle année. La symbolique du chiffre 13 fait référence à la religion: les 12 apôtres et le Christ. La composition de ces treize desserts est en fait pleine de bon sens, ils sont de saison et proviennent majoritairement du terroir.
Parlons tout d’abord des quatre mendiants : il représentent les ordres religieux ayant fait vœu de pauvreté :
Les noix et les noisettes symbolisent les Augustins; les figues séchées : les Franciscains; les amandes : les Carmes et les raisins : les Dominicains.
Tous les autres font référence au bon sens paysan: on consomme les fruits de saison frais (pommes, poires, verdau, dattes et oranges, les sorbes étant des raisins très murs). Certains ont été séchés pour être consommés en hiver. Ils restituent ainsi leur belle énergie (amandes, noisettes, figues sèches).
Les dattes et les oranges me direz vous ne viennent pas de Provence ? L’orange est symbole de richesse et les dattes, celui du Christ venu d’Orient. Les oranges sont maintenant souvent remplacées par les clémentines.
A cela on ajoute quelques douceurs sucrées, spécialités de Provence faites avec les produits du terroir: les nougats noirs ou blancs (amandes) , les calissons (friandises faites avec du melon confit et des amandes) ainsi que de la pâte de coing, le Gibassié (pompe à l’huile d’olive) qui, selon la tradition, se rompt comme Jésus l’avait fait avec les petits pains.
Il y a eu bien sûr plusieurs codifications au fil du temps. En Provence, nous partageons cette tradition avec de nombreux pays du Bassin Méditerranée. Et l’on retrouve la consommation au moment du réveillon de Noël d’un ou plusieurs éléments des 13 desserts chez les Juifs Séfarades, les Grecs d’Égypte, la Espagnols de Catalogne et les Arméniens de Marseille.
Et vous comment sera composé votre repas de Noël ? Plutôt maigre ou plutôt sophistiqué ?
Avez vous coutume de mettre aussi les 13 desserts ?
Les roulettes vous souhaitent un bon bout d’an, à l’an que ven !
Se sian pas mai, que siguen pas men!
En savoir plus sur Des roulettes sous les pieds
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super article,
j’ai appris beaucoup sur la belle tradition provençale.
bon zut, je n’ai mis que 2 assiettes pour le blé de la Sainte Barbe, mais il est beau.
merci Christine
joyeux Noel
Merci Christiane. Ça ira quand même. Très Joyeuses Fêtes. A l’an quevin.
super toutes ces précisions !
Ici ce sera un peu de foie gras aux letchis fabrication récente à la Réunion mais qui est très goûteux et se digère bien au cours de nos repas festifs de l’été ! En suivant des joues de légine au combava accompagnées d’un bol de riz et un dessert glacé et des letchis frais à volonté !
Joyeux Noël !
Un joli Noël pour toi aussi et pour les amis de la Réunion.
Merci pour ce joli article de fin d’année, qui met en avant la tradition des 13 desserts ! 🙂
Je suis ravie que cet article vous ai plu. Merci pour votre commentaire.
Bien qu’étant provençale, j’ai appris des détails que je ne connaissais pas. Merci Christine pour ce bel article documenté !
Merci Nadine. Il y a tant et tant de belles traditions dans notre Provence. Bonne préparation de Noël!!!
Je ne connaissais pas du tout le Cacho Fio. Mais comme dit très justement, les cheminées se font rares ! Par contre, pas un Noël sans les 13 desserts ! Il faut s’y mettre à plusieurs chaque année pour réciter la liste !
Oui oui je sais, pour les treize desserts, on a toujours peur d’en oublier un .
J’adore toutes ces traditions de Noël même si nous ne les appliquons pas toutes! Celles des 13 desserts est aussi bien présente en espagne (dont je suis originaire) du coup notre table de Noël est elle aussi très gourmande avec tous ces desserts un petit peu différents malgré tout… (turron, polvorones, mantecadas…)
Très Joyeuses Fêtes et bon réveillon !!
Ton récit me rappelle mon ami marseillais. C’est grâce à lui que j’avais découvert la traditions des 13 desserts de Noël, un repas ultra gourmand et qui fait la part belle aux traditions. En découvrant ton article bien détaillé, je suis ravie d’en apprendre davantage sur cette belle tradition made in Provence (et ça ravive ma mémoire!)
Quand on énumère les 13 desserts, j’entends toujours la voix d’Augustine qui les cite !
Provençale, le blé est notre coutume, la crèche et ses 13 desserts le rituel indispensable chez nous !
Que ça fait du bien de lire cet article remplis de bons souvenirs !
MERCI 🙂
Bisous & qu’aquesto annado vous adugue lou bonur, la pas, la joio, l’amour, la santa, l’amista, … <3
Merci beaucoup. Joyeuses Fêtes et « A l’an que vèn, se siam pas mai que fuguem pas mens »
Merci beaucoup. Joyeuses Fêtes et « A l’an que vèn, se siam pas mai que fuguem pas mens »
le cacho fio (la bûche de bois ) on la met sous la cendre en fin de soirée du 24 et c’est le 25 qu’on la brûle ! la tradition veut qu’on en recueille les cendres et qu’on les distribue aux participants, famille , amis , visiteurs , jusqu’au 27 inclus comme porte bonheur .
Merci beaucoup pour votre commentaire qui complète merveilleusement cet article. Bon bout d’an à vous !