Visiter le nord-ouest du Tamil Nadu est une expérience rare qui permet d’être témoin de la vie quotidienne des Tamouls dans les villages ruraux . Ici, la vie est faite de travail et de dévotions. Malgré sa croissance, l’Inde rurale reste pauvre. Nous sommes au cœur de l’Inde du Sud et aux pieds de la forêt luxuriante des Ghâts occidentaux, et pourtant, ces villages sont peu fréquentés par les touristes surtout friands de temples. Notre parcours se poursuit au milieu des champs de fleurs de jasmin près d’Athoor, non loin de Madurai, et ensuite, dans les plantations de cocotiers près de Pollachi.
Je vous propose de vous emmener à la découverte de ces villages simples et authentiques. J’espère que cette immersion vous ravira et vous donnera envie, à votre tour de découvrir la vie quotidienne au Tamil Nadu dans ces villages du nord-ouest.
L’Inde se trouve dans les villages – Mahatma Gandhi
Malgré sa croissance, l’Inde reste rurale et pauvre. La majorité des Indiens vit dans les campagnes malgré la croissance effrénée des mégalopoles. La révolution verte, politique agricole initiée et soutenue par l’État a fait de l’Inde un pays essentiellement agricole et autosuffisant avec une grande disparité selon les régions.
Ici, dans le nord-ouest du Tamil Nadu, la vie se déroule au rythme des saisons et des préoccupations quotidiennes. Certains travaillent aux champs, d’autres tissent des saris ou fabriquent des pots en terre, d’autres encore exercent ces petits métiers nécessaires à la communauté. La religion les accompagnent tout au long de la journée et vous ne manquerez pas d’assister à leurs dévotions et peut être même au sacrifice d’une chèvre, au détour d’une rue … Vous serez accueillis avec curiosité, bienveillance et joie.
Le bleu est la couleur qui représente le courage, la victoire du bien contre le mal, la vérité, ainsi que la pureté des sentiments.
Le bleu est aussi la couleur des castes de tisserands, artisans ou encore agriculteurs.
Tout au long de notre voyage, nous avons pu constater la grande importance des « marchés paysans » qui offrent la possibilité à chacun de vendre sa production maraîchère pour nourrir la population locale comme celui de Nilakottai dont je vous parle dans cet article. L’alimentation des Indiens est en grande partie basée sur les céréales et les légumineuses à haut potentiel en protéine (protéagineux).
Où sommes-nous ?
Nous longeons les Ghâts occidentaux et le parc national « Indira Gandhi ». Il s’agit d’une chaîne de montagne d’environ 1 600 kms de long, qui se déroule le long de la mer d’Arabie à l’ouest. De ce côté, le plus à l’ouest du petit état d’Inde du Sud, se trouve donc une zone rurale, avec des villages traditionnels centrés principalement sur l’agriculture, l’artisanat traditionnel et le tissage. Nous sommes très proches, à vol d’oiseau du Kerala. Le point de passage entre les deux états dans la montagne est « la trouée de Palghat » (Palghat Gap), située entre les Nilgiri (les montagnes bleues), au nord, et les Monts Anaimalai au sud. Cette bande, large d’une trentaine de kilomètres, est la seule passe importante dans les Ghâts occidentaux, qui permet de relier le Tamil Nadu au Kerala et donc à la mer d’Oman. (Source Wikipédia). Sur le plan économique, le Tamil Nadu fait partie de ce que l’Inde appelle les « États intermédiaires », c’est à dire, dotés d’atouts non négligeables, mais insuffisamment exploités. Les autres états étant répartis entre états très pauvres et ceux jouissant d’une relative prospérité. Le petit état s’en sort donc pas trop mal entre les produits de l’agriculture, l’industrie textile, automobile, pharmaceutique et chimique.
Nous venons de quitter Madurai. Nous allons passer deux nuits à Cardamome House , située près du village d’Athoor. Cette charmante guest house est tenue par un anglais. Cet ancien médecin à la retraite est installé dans la région depuis vingt ans. L’établissement surplombe le lac Kamarajar dont le niveau de l’eau dépend de la mousson, situé prés du village d’Athoor. L’équipe est aux petits soins avec ses hôtes. C’est un havre de paix et un lieu privilégié pour l’observation de la nature, des oiseaux et des papillons et de la flore.
La nuit a été étouffante et nous avons eu du mal à dormir. Nous avons l’heureuse surprise de trouver, au petit matin, la table du petit déjeuner dressée sous la véranda juste en face de notre chambre. Le personnel est charmant et attentionné. Je les amuse beaucoup avec ma boîte de « pain des fleurs » (sorte de biscotte sans gluten) que j’ai amenée de France. Le départ est fixé à 9 heures.
Trois jours, donc, pour découvrir la vie authentique du Tamil Nadu et de ses petits villages : de Nikolatai à Vettaikaranpudur et profiter de la vie quotidienne des habitants du Tamil Nadu
Sommaire
Visiter le nord-ouest du Tamil Nadu : que faire dans la région d’Athoor, au pays du jasmin ?
Nous empruntons tout d’abord une route qui traverse la campagne avec des plantations de toutes sortes et des bananeraies mais, ici, la spécialité c’est la culture des fleurs et surtout celle du jasmin. Le but de la journée est de découvrir le marché aux fleurs de Nilakottai, le petit village d’Athoor, et, de retour à Cardamome House de découvrir le lac Kamarajar .
1- Acheter des fleurs au marché aux fleurs et aux légumes de Nilakottai.
Le jasmin est la fleur préférée des Indiens. Les femmes le tressent pour parer leur chevelure, les mêmes tresses vont servir d‘offrandes aux divinités. On en extrait le parfum pour baigner les statues. Le jasmin le plus réputé, qui bénéficie d’ailleurs d’une appellation d’origine, est celui que l’on cultive dans la région de Madurai. La pleine saison est au mois d’avril, nous sommes en mars et les champs sont déjà pas mal fleuris.
A Nilakottai, se trouve le plus grand marché aux fleurs de la région. La petite ville se trouve dans le district de Dindigul, au nord-ouest de Madurai. Ici, nous sommes bien loin des temples qui constituent l’attraction touristique majeure.
Les fleurs qui y sont vendues sont destinées aux cérémonies traditionnelles. On y trouve, à côté d’autres tubéreuses (plantes à parfum), l’odorant et onéreux jasmin de Madurai. Je filme et photographie au milieu d’une foule affairée et sympathique. Chacun vaque à ses occupations et les sourires se multiplient devant mon objectif. Les gens se laissent photographier avec plaisir. Les sourires s’échangent et les yeux pétillent. L’air embaume l’odeur entêtante et enivrante du jasmin. Ce sont les hommes qui vendent le bouton, trésor blanc de la région.
Au fond du marché, des hommes et des femmes fabriquent des tresses avec le jasmin et d’autres fleurs colorées comme les œillets d’Inde vermillons, et des fleurs de lauriers roses.
Plus loin, nous entrons dans le secteur du marché aux légumes. Les fruits et les légumes sont ici en abondance et bien rangés sur leur étal. La palette de couleurs est magnifique. Une vendeuse me fait signe d’approcher, me saisit la main gauche et y dépose une poignée de son repas. J’essaie de me rappeler les règles : on ne mange qu’avec la main droite.
Un marchand de poisson séché m’interpelle pour que je le photographie, ainsi que le mari d’une femme transportant sur la tête un énorme sac de boutons floraux. Cette foule n’est jamais oppressante. Les sourires d’abord timides s’enhardissent et les mains se tendent pour serrer la vôtre. Toucher un étranger porte bonheur!
2- Flâner dans le village d’Athoor
Un peu plus loin, le village d’Athoor aux jolies maisons bleues semble assoupi sous le soleil. Le village se trouve à 90 kms de Madurai. Le plan de la ville est organisé autour des trois religions : on y trouve le quartier hindou, le quartier musulman et le quartier catholique. C’est un village rural authentique, très peu fréquenté par les touristes. On peut facilement et tranquillement marcher dans les rues. La région est une zone sans déchet et sans plastique. Elle a reçu le prix du village le plus propre du district de Dindigul.
3- Se promener dans la forêt près du lac Karamajar
De retour à notre guest house, notre chauffeur nous accompagne au lac Kamarajar qui se trouve en contrebas. Un temple animiste de la fécondité s’y trouve. Les femmes en mal d’enfant y déposent toutes sortes d’offrandes en forme de berceau. Le lac est un réservoir qui se remplit au moment de la mousson. Il n’est pas très plein en ce moment mais il y a quand même quelques beaux oiseaux.
Il y a de l’animation ce soir-là. Nous partageons le dîner avec Marie et Philippe sans savoir, à ce moment-là, que nous allons bientôt devenir compagnons d’infortune. Les nouvelles de l’épidémie en France ne sont pas très bonnes. Nous sommes ici à l’écart de tout et protégés, nous semble-t-il.
Visiter le nord ouest du Tamil Nadu: en route pour Pollachi et le temple de Palani
Les valises sont prêtes pour un départ à 9 heures après le petit déjeuner. La question existentielle du matin se pose des œufs oui mais comment ? En omelette ? Sur le plat ? Ou brouillés ? Nous saluons notre hôte, un charmant monsieur anglais qui vit ici depuis 20 ans et fait tourner son établissement avec du personnel indien. Il nous demande pourquoi nous le quittons et nous, ingrats que nous sommes, nous le délaissons car nous sommes impatients de vivre d’autres aventures. Il y a quelque chose qui a changé dans l’atmosphère ce matin. Rajesh, notre chauffeur, nous salue avec le « Namaste » habituel que nous avons instauré depuis le départ mais il ajoute – et son angoisse est palpable – qu’il ne faut plus se serrer la main. Nous le sentons un peu tourmenté.
Au nord de Madurai on cultive le jasmin. Sur la route, les champs de fleurs font de jolis tapis multicolore. Nous faisons un petit arrêt pour voir d’un peu plus près les fleurs de coton.
Visiter le nord-ouest du Tamil Nadu, c’est l’assurance d’être immergé dans la vie quotidienne spirituelle des Tamouls qui consacrent beaucoup de temps à la prière et aux dévotions. Le temple de Palani est situé en haut d’une colline très abrupte et l’accès se fait accès par télécabine ou funiculaire. Le temple est dédié à Murugan, le fils de Shiva, un dieu particulièrement vénéré au Tamil Nadou. Il est situé dans la ville de Pazhani à 100 kilomètres au sud-est de Coimbatore.
Comme nous, déposés au pied du funiculaire, Marie et Philippe nous apprennent qu’ils sont là depuis une demie heure, que la file d’attente n’avance pas et qu’ils vont certainement se rendre à pieds jusqu’au temple, pieds nus bien entendu.
Nous les quittons et décidons alors de prendre un Tuk Tuk pour nous avancer jusqu’au départ du téléphérique où nous rejoignons une file d’attente. Des enfants et des adultes le crâne rasé et enduit d’une pâte au curcuma nous accompagnent. En effet, une des traditions principales de ce temple est la tonsure des fidèles qui font le sacrifice de leur chevelure. Ils offrent leurs cheveux à la divinité du temple pour se libérer du Karma.
Nous prenons patience. Un message par mégaphone nous avertit alors que la télécabine est arrêtée et qu’il faut attendre une heure. Comme les indiens présents, nous quittons la file. Nous n’aurons pas le courage comme Marie et Philippe de faire le pèlerinage en grimpant pieds nus les 693 marches brûlantes sur la colline haute de 650 mètres.
Nous faisons route ensuite vers notre prochain hôtel, situé à Pollachi. Nous traversons des champs de cocotiers et pouvons voir le long de la route les petits métiers en lien avec cet arbre, comme par exemple la fabrication de cordes à base de fibres de noix de coco.
Notre hôtel est niché dans une plantation cocotiers et cacaoyers. Le SPA propose des massages, nous y faisons un massage indien plus que vigoureux sur une table en teck inondée d’huile de sésame et pratiqué par la poigne très ferme de notre masseuse. Une expérience à faire en connaissance de cause et en n’hésitant pas à limiter les ardeurs de la masseuse!
Nous suivons les actualités en France sur l’épidémie Covid 19 et nous savons qu’à compter du lundi 9 mars, « le gouvernement interdit les rassemblements de 1.000 personnes ». Le stade 3 n’est plus très loin.
Visiter le nord-ouest du Tamil Nadu : scènes de la vie quotidiennes à Vettaikaranpudur, Animalai et Periya Negaman
A partir de cette date, Marie, Philippe et nous, allons partager un destin commun. Pour les visites de la journée, nous ne prenons qu’un seul véhicule. C’est Joy qui conduit. Lui et Rajesh forment un joyeux tandem.
Se mêler aux habitants pour découvrir leur mode de vie
Au bout du chemin, se dresse le temple. Mêmes rites, même ferveur partagée, même onction, mêmes prières.
La divinité à laquelle le temple est consacré a la réputation de guérir les malades. Pour obtenir la guérison, il faut contourner le trident. Une femme est allongée par terre, elle tousse et a entrepris de faire le tour du temple en roulant sur elle-même en demandant la guérison.
Il fait chaud, le soleil de midi est brûlant et devinez quoi, Joy sort son joli parapluie pour se protéger. Un groupe de villageois prépare une cérémonie. Attirée par la musique, je jette un œil à l’intérieur de la bâtisse. Les hommes nous invitent à se joindre à eux. Ce que nous faisons bien volontiers et participons aux offrandes. Un brahmane nous bénit avec de la cendre.
En sortant, nous assistons au début d’une cérémonie de sacrifice d’une chèvre. Les enfants nous entourent. Nous avons prévu des bonbons que nous leur distribuons. Nous passons notre chemin avant la mise à mort.
Nous nous promenons longuement dans le village aux maisons basses traditionnelles dont les toits sont recouverts de tuiles très anciennes. La couleur dominante est blanc-bleuté. Le village est très pauvre. Devant les maisons les noix de cocos sèchent. Dans la rue, accroupies à même le sol, des femmes nettoient des tuiles anciennes.
Plus loin les couturières et la repasseuse s’affairent … le fer de la repasseuse est chauffé au charbon de bois …je reste un moment pour admirer son travail.
Et pour finir cette matinée, je ne résiste pas au plaisir de vous montrer les magnifiques camions TATA
Nous prenons notre déjeuner dans un petit restaurant et dégustons un traditionnel Thali très épicé, fait de riz accompagné de plusieurs petits plats, le tout servi sur la traditionnel feuille de bananier. Ici, on mange avec les doigts mais nous avons droit à une cuillère. Nous partons ensuite pour un autre village dont la particularité est d’abriter 150 artisans qui travaillent à la confection des Saris. Il s’agit du village de Periya Negaman.
Devenir incollable sur le tissage des saris grâce aux artisans tisserands de Periya Negaman
Chaque maison abrite un atelier. Tous participent à la fabrication de ces pièces d’étoffes en coton : filage, teinte, préparation des bobines, tissage. Nous passons de maison en maison et sommes accueillis par les familles qui nous permettent d’admirer leur travail. Nous achetons quelques pièces de tissus chez un grossiste: Lakshmi textiles . Vous trouverez leur travail en 8:58 de la vidéo.
Quand un virus et une pandémie s’invitent dans le voyage ….
En fin d’AM, dans la voiture, nous apprenons par notre agence que les étrangers ne sont plus les bienvenus au Kerala. Il y a eu des mouvements de foule contre des touristes occidentaux dans les Backwaters. Cet état nous ferme donc ses portes. Le Tamil Nadu et le Karnataka vont certainement en faire autant. L’Inde en général interdit l’entrée aux ressortissants européens (principalement Italie, Espagne, Allemagne et France.) Les cas de Coronavirus avérés seraient liés au retour d’Indiens ayant séjourné en Italie.
Il va donc falloir écourter notre voyage. Marie et Philippe devaient rentrer en France le 19 mars. Notre retour à nous devait se faire le 30 mars. Nous en sommes donc à la moitié. Nous sommes abasourdis. Nous essayons de gagner du temps et demandons à prolonger notre séjour dans la plantation à Valparai de deux jours supplémentaires. Nos charmants compagnons d’infortune font de même. Ce soir-là nous dînons ensemble, une habitude que nous avons prise, nous sommes sous le choc de la nouvelle.
Le voyage continue cependant … nous partons pour Valparai
et ses plantations de thé et de caféier
Incredible India … Everything is possible !!
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Ah Christine comme tu sais bien écrire…. lire ton récit m a replongé en inde j ai retrouvé toutes les sensations les odeurs les émotions. Les larmes me sont venus . Amitiés
Merci Marie pour ton commentaire. Il reste encore un article et je rangerai ce voyage au rayon des beaux souvenirs …. A bientôt .