cj-en vadrouille juin 30, 2019Comment visiter le Damaraland en Namibie ? Avec ses vastes étendues semi-désertiques et rocailleuses, ses plaines recouvertes de savane et ses montagnes, sa faune, son histoire et ses habitants, le Damaraland va vous en mettre plein la vue. Ici le peuple San (Bushmen ou Bochiman) a laissé son empreinte avec les peintures et les gravures rupestres, témoignages de la vie spirituelle des premiers hommes préhistoriques. Vous y ferez des rencontres marquantes avec les tribus qui peuplent encore ce territoire et avec les animaux qui y vivent en totale liberté. Vous y rencontrerez les Damaras qui ont donné leur nom à la région, mais aussi des Héreros, des Namas et les fières Himbas descendues du nord.
Nous revenons de la côte océane, là où les dunes de sable se jettent dans un océan atlantique tumultueux. Où le paysage est façonné par le vent, la brume et le rugissement des vagues. Ce territoire est le témoin vivant de l’histoire de la Namibie.
Le Damaraland est situé entre le désert du Kalahari et le désert du Namib. Au centre, se trouve le massif du Branderberg. Le nom « Damaraland » vient de son histoire violente quand les allemands et ensuite les sud-africains ont confiné les tribus dans des « homelands ». Les Damaras y demeuraient alors librement. Ils furent contraints de vivre dans un Bantoustan autonome. Ils restèrent sur place et la région pris le nom de Damaraland. Depuis l’indépendance, le territoire a réintégré le pays. Les rhinocéros noirs et les éléphants du désert cohabitent avec le peu d’habitants. La région est très pauvre. L’environnement est difficile et aride mais magnifique … comme partout en Namibie. Nous y avons fait des rencontres inoubliables avec les habitants.
Sommaire
Comment visiter le Damaraland en Namibie : nos rencontres dans les plaines arides du nord ouest
Nous quittons la côte et empruntons la piste. Nous traversons une immense étendue de sable, du sable jusqu’au bout de l’horizon. La silhouette du massif du Brandenberg nous accompagne.
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Le Cactus and Coffee, la nostalgie des temps anciens
A Uis, nous ferons une halte délicieuse pour le déjeuner au Cactus and Coffee. Imaginez une oasis dans le désert, un village qui a connu en son temps la prospérité grâce à une mine d’étain (la plus grande du monde, désormais abandonnée à cause de sa faible concentration en minerai) et, au milieu de cela, le Cactus and Coffee, un charmant endroit pour déguster de délicieux gâteaux, pancakes et smoothies. Vous pouvez aussi y camper si le cœur vous en dit.
Nous déjeunons d’un sandwich et d’un « chocolate cake » pour Bernard, d’un « carrot cake » pour moi. Et prenons le temps de discuter avec la propriétaire du lieu. Un changement s’est amorcé ici, comme partout en Afrique. Elle nous parle des Chinois qui investissent dans la région. Elle a l’air un peu perdue et tellement désolée.
Sur le bord de la route, nous rencontrons des vendeurs d’artisanat local. Le mot « craft » se répète à l’infini … Les Himbas ci-dessous, viennent de leur région située plus au nord, pour faire du commerce. Ici, il y a peut être plus de touristes …. En cette fin de saison des pluies, pourtant, les visiteurs sont peu nombreux. Elles se tiennent au bord de la route et nous appellent avec insistance. Nous nous arrêtons et achetons des bracelets. Ce sont les mêmes un peu partout. Elles nous disent que ce sont elles qui les fabriquent, nous faisons semblant de les croire. Ce n’est pas important, c’est le moyen d’entrer en contact avec elles. Comme d’habitude nous demandons l’autorisation de faire des photos qu’on nous accorde bien volontiers. Ces dames ont l’habitude.
La région est très pauvre avec de petites exploitations, souvent à l’abandon. A une heure du campement nous sommes seuls au monde sur la piste de sable rouge.
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Rencontre avec les Damaras
Le « Damara Living Museum » est la reconstitution du village ancien. La visite peut être combinée avec celle du village actuel. Accompagné d’un guide jeune et plein d’entrain, nous découvrons leurs coutumes ancestrales (soins par les plantes, techniques de chasse …). Les « acteurs » terminent par des chants et danses traditionnels. Un joli moment en leur compagnie.
Les Damaras sont à l’origine des chasseurs cueilleurs. Ils parlent le Khoisan. Réduits en esclavage par les Namas, et affranchis, ils ont été cantonnés dans un territoire : le Damaraland, à la fin du 19ème siècle. D’origine bantous, ils sont de grandes tailles et de peau plus foncée que les autres tribus. Seul un quart de leur population vit encore sur les terres pauvres du Damaraland.
Je vous ai parlé de la notion de Homeland dans notre premier article Road trip en Namibie: de Windhoek à Fish River Canyon en passant par le Kalahari.
Nous arrivons en fin d’après-midi à Twyfelfontain qui signifie « la source incertaine ». Nous passerons la nuit au Twyfelfontein Country Lodge. Dès l’arrivée, nous faisons un petit tour avec un guide du lodge dans notre propre véhicule pour voir les éléphants du désert. Ces pachydermes ont réussi à s’adapter aux conditions extrêmes du désert du Namib. La veille au soir, il avait plu et ce n’était pas arrivé depuis fort longtemps. Attirés par le trou d’eau proche du lodge qui était désormais bien rempli, nous avons eu le privilège de voir 24 individus arriver de la plaine pour se désaltérer dans cet endroit très proche de nos chambres. Un d’entre eux, un peu maladroit, a mis sa grosse patte sur une canalisation, ce qui nous a valu quelques heures sans eau, le temps de la réparation. Quel spectacle !!
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Twyfelfontain, le plus grand site archéologique d’art rupestre d’Afrique
13ème jour – 2 avril – visite du site archéologique de Twyfelfontain le matin tôt . Attention le site est très chaud – visite l’après midi déconseillée – prévoir de l’eau –
Le site est inscrit au Patrimoine mondial de l’Unesco. Il se trouve dans une vallée au milieu de montagnes de grès. Ici, il y a 6000 ans, le peuple San a laissé un témoignage de sa vie spirituelle avec ces gravures rupestres. Ces pétroglyphes participaient aux rites funéraires chamaniques. Ils représentent des animaux. Les Sans croyaient dans la réincarnation de l’esprit des hommes dans le corps des animaux. C’est la plus grande concentration d’art rupestre d’Afrique.
Nous reprenons la route en direction de Palmwag – 112 kms – 1 heure 30 –
Nous traversons une zone qui a dû être bien irriguée par le passé et franchissons de nombreux oueds à sec.
Visiblement la région est très pauvre. Nous laissons sur le bord de la route des maisons en tôle ondulée. Il y a un peu d’élevage et des vendeurs de « craft » (artisanat) local. Nous sommes dans le haut du Damaraland.
Avant d’entrer dans la concession de Palmwag, attendez vous à un contrôle sanitaire. Pour cause de maladie du bétail dans le nord, il est interdit de transporter de la viande crue. Ce contrôle est effectif surtout lorsque l’on sort de la concession (du nord vers le sud).
Avant de devenir une concession, Palmwag Lodge a été une ferme, puis une réserve de chasse pour gibiers. Désormais, le lieu est engagé auprès du ministère de l’environnement et du tourisme pour la conservation des rhinocéros. Ici, pas de climatisation, pas de wifi.
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Notre auto tour dans la réserve de Palmwag
14ème jour – 3 avril- autodrive dans Palmwag
Départ le matin pour la concession animalière. Il est conseillé de rouler très lentement, la piste qui longe la rivière Uniab est vraiment très difficile.
La concession de Palmwag s’étend sur 5 500 km2 dans le Kunene au nord ouest de la Namibie.
Les paysages sont à couper le souffle. La zone semi-aride que traverse la rivière Uniab propose un univers minéral avec des oasis dans le canyon de la rivière. Il est dit qu’on y trouve des girafes, des éléphants du désert, des lions, des léopards, des hyènes….des oiseaux et des espèces endémiques de la région… nous n’aurons vu que 3 girafes et quelques springboks!
Une anecdote au sujet des girafes : elles se tiennent souvent complétement immobiles dans le paysage, et pendant longtemps, à tel point que, longeant la concession, il m’est arrivé de penser que c’était peut être des statues …
15ème jour – 4 avril – Départ pour Vingerklip Lodge dans le Damaraland 289 kms – 4 heures 15
En sortant du lodge le contrôle sanitaire est plus pointilleux. L’employé nous demande d’ouvrir notre réfrigérateur pour vérifier si nous ne transportons pas de viande crue.
Nous choisissons de passer par le Grootberg Pass, malgré la difficulté de la montée. Le plateau domine la vallée de la rivière Klipp. Le panorama est splendide.
La zone devient verdoyante, le matin nous avons le soleil en face. Beaucoup de cailloux et de graviers. Risque dérapage. Comme d’habitude, les vendeurs sont au bord de la route.
A Kamanjab nous faisons des réserves d’eau au supermarché. Des femmes nous proposent des petits bracelets. Nous en achetons bien volontiers, en nous livrant à l’exercice du marchandage. Ici nous sommes à 40 kms d’Etosha. Des « Ladies Héréros » avec leur magnifique costume sont au loin … je n’arriverai pas à les aborder …
Voici un lien vers un article de Géo, si vous souhaitez faire connaissance avec le peuple Herero, victime du plus grand génocide d’Afrique et qui réclame, encore aujourd’hui, une indemnisation à l’Allemagne : Namibie, les héréros n’abdiquent jamais.
Rencontre avec les fières et fascinantes Himbas
A 20 kms de Kamanjab, se trouve un village Himba d’occupation « temporaire »: « Otjikandero Himba Orphan Village ». Les Himbas, « le peuple rouge » sont des pasteurs semi nomades. Ils viennent d’Opowo dans l’extrême nord-ouest de la Namibie, là où les hommes partagent de manière pacifique le territoire avec les animaux sauvages. Ce sont des Hereros qui ont été chassés par les Namas au milieu du 19ème siècle et sont donc devenus « Himbas », c’est à dire mendiants.
Ils passent dans ce village entre trois et six mois avant de retourner chez eux dans le Kaokoland. Le projet a vu le jour grâce à Mukajo, dernière reine de la lignée des Ovahimba pour venir en aide aux orphelins. Sur le site, les enfants sont élevés de manière traditionnelle mais reçoivent des soins de type occidental quand la médecine traditionnelle ne peut plus rien faire. L’espoir du projet est de permettre à cette tribu de continuer à vivre selon ses traditions dans un monde occidental.
Ce peuple est passionné par la beauté corporelle et respectueux de la vie sauvage. Il est animiste, comme les Sans.
Photographiée pour de nombreux magazines, filmée par « rendez vous en terre inconnue« , la tribu fait l’objet d’une véritable fascination, peut être maintenant à son détriment. Ces femmes sont dignes, graves et parfois moqueuses. Elles ont la certitude d’être belles comme des déesses. Comme nous voyageons pendant la basse saison, nous sommes seuls. Ce village, est une bonne approche et un moyen de faire leur connaissance.
Le village que nous visitons est une reconstitution, tout est organisé. La visite payante est faite par un guide avec des explications en anglais. Certaines personnes reprochent à ces femmes leur mise en scène … certains même parleront de zoo humain.
Mes sentiments sont toujours aussi confus. Je me suis sentie très heureuse de cette visite et en même temps mal à l’aise, en imaginant quels seraient mes sentiments si des touristes débarquaient chez moi et me prenaient en photo sous toutes les coutures.
Et, en même temps, contrairement à d’autres témoignages sur le sujet, je suis certaine d’avoir échangé des regards de connivence avec ces femmes et j’ai pu rire avec elles. Elles nous trouvent étranges. Il y a tant de choses que nous ignorons et l’Afrique est complexe. Une association Kovahimba tente de les aider. Un de leur projet vient d’aboutir : la construction d’un puits.
Faisons connaissance avec les Himbas ….
Avant d’entrer dans le village, notre guide nous apprend à nous présenter en disant « Moro » (bonjour), « Perivi » (comment allez vous) « Nava » (je vais bien). Les Himbas et les Sans sont les dernières tribus d’Afrique à vivre strictement dans le respect des traditions. Les Himbas vivent selon un système matriarcal, les femmes sont chef de famille.
Elles montrent leur poitrine mais pas leurs chevilles qui sont considérées comme la partie la plus impudique du corps féminin. Himbas et Héréros sont le même peuple, ils parlent le bantou. Les Héréros construisent des huttes carrées, les Himbas des huttes rondes.
Les Himbas sont des pasteurs semi-nomades. Ils ont une véritable vénération pour leur vache, ils se nourrissent surtout de bouillie de maïs avec du lait, d’un peu de viande et ne tuent une vache que pour une cérémonie. La coiffe des femmes rappelle les cornes de leur animal préféré. La coiffure est composée de leur cheveux enduits d’argile se terminant par des extensions achetées dans le commerce. Auparavant, elles utilisaient le crin de leur bétail.
Pour une femme Himba, l’eau est complètement tabou. Seules les petites filles peuvent toucher l’eau. C’est pour cette raison qu’elles s’enduisent complètement d’un mélange d’ocre et de beurre fabriqué par elles-même. L’ocre provient d’une montagne sacrée et ne peut être récolté que par les femmes ménopausées.
Notre guide nous propose d’entrer dans une hutte pour nous montrer comment se déroule le rituel de la toilette. Les femmes s’enduisent tous les jours d’une préparation ocre/beurre et se parfument à l’aide d’un brûle encens. Chaque femme fabrique son parfum en mélangeant différentes herbes. Nous assistons à un bain de fumée. Ce sauna permet la sudation. La transpiration nettoie les pores de la peau des impuretés. Il sert aussi de nettoyage à sec pour les couvertures et les vêtements.
Les femmes se laissent photographier très volontiers, une d’entre elles me demande même de voir son portrait. Heureusement, elle a eu l’air satisfaite.
Leur civilisation est menacée par le projet de barrage sur la rivière Kunene qui va engloutir leurs terres de pâturages. Mais elle est surtout menacée par cette envie qui titillent les jeunes de renoncer à cette différence provoquée par les coutumes comme par exemple, ne plus se faire extraire les quatre dents du bas, s’habiller comme tout le monde, posséder un portable, habiter en ville.
Et pour finir ….Vingerklip, un petit air d’ouest américain
Nous reprenons notre voiture. A la sortie du village, une femme qui garde le troupeau et plus loin un homme nous font un signe amical de la main, nous emmenons cette image chaleureuse avec nous et nous nous dirigeons ensuite vers Outjo. En fin d’après midi nous arrivons au Vingerklip Lodge.
Vingerklip signifie « doigt de pierre ». Il s’agit d’une formation géologique rocheuse de 35 mètres de haut. Ce doigt de pierre domine une vallée issue d’un plateau en forme de table, connue sous le nom de terrasses Ugab. Ici le vent a sculpté un paysage époustouflant. On a l’impression d’être à Monument Valley. Nous avions déjà cette sensation d’être dans l’ouest des USA lors de notre étape à Uis et Kolmanskop. La piste qui mène au lodge est bordée de termitières blanches comme la terre. La végétation change, elle devient plus verte. La particularité de cet établissement est de proposer un dîner « barbecue » sur un promontoire auquel on accède après une ascension d’une heure en empruntant des escaliers en bois. Très bonne condition physique requise. Pour les moins sportifs, le restaurant principal est très bien. Nous ferons avant le dîner, la promenade qui contourne le plateau.
crédit photos ©desroulettessouslespieds
Ce parcours a été riche en rencontres comme vous avez pu le constater. La dernière partie de notre road trip en Namibie va maintenant se dérouler dans les réserves privées du centre qui se trouvent en dessous d’Etosha mais sont exemptes de palud. Les propriétaires de ces réserves jouent la carte de la protection des animaux et apprennent aux habitants à coexister pacifiquement avec eux.
- Pour la concession de Palmwag : l’entrée de la concession est à 13 kms au nord Uniab – il faut payer 260 dollars namibien au lodge – Un véhicule 4X4 est obligatoire (on roule sur des cailloux) – Un guide n’est pas nécessaire – Il est possible de descendre de la voiture en évitant de s’approcher des prédateurs, des rhinocéros et des éléphants.
- Faire très attention et rouler bien à gauche et prudemment dans le Grootberg Pass
- Le village Himba se trouve à 20 kms de Kamanjab sur la C40 en direction d’Outjo : Otjikandero Himba Orphan Village- l’entrée est payante – environ 25 Euros par personne. Le village a été créé pour récolter de l’argent pour les orphelins.
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c est compliqué de retenir les noms mais si intéressant ! je vais regarder une autre fois …quel dépassement ! un autre monde , difficile et simple si proche d’une nature préservée ! pas de tablettes de iPhone d’antennes relais… OUF!
Merci Anna. Oui une nature sublime et tellement rude. Un dépaysement salutaire qui fait réaliser que le plus simple dans la vie est encore le meilleur ….et en même temps, une population qui rêve de notre modèle de développement…..
Hello Christine, J’ai été fasciné par ton récit sur les Himbas et Héréros, Ce peuple est séduit par le développement et le modernisme et si attaché a des traditions séculaires. Un monde dont les coutumes sont aux antipodes que ce que nous connaissons. Mais comme tu le dis si bien, l’Afrique reste mystérieuse et fascinante.
Hello et merci pour le commentaire. Le passage chez les Himbas fut effectivement un moment très fort de ce voyage.
Tes photos me font vraiment voyager, c’est un vrai dépaysement ! J’aime tellement l’Afrique, c’est incroyable qu’elle soit autant boudée par les voyageurs (mais tant mieux d’ailleurs, cela évite le tourisme de masse). C’est le seul continent où je me sens vraiment « ailleurs », où les disparités et les contrastes sont aussi forts ! Super article en tous cas !